Création Poétique
Séquence en 6e
Récits de créations - Création poétique
Groupement de textes
Comment le jeu avec les mots, avec la langue, peut-il devenir de la poésie ?
Svi S15 Eval Oral

Fenêtres ouvertes

Le matin - En dormant

J'entends des voix. Lueurs à travers ma paupière.
Une cloche est en branle à l'église Saint-Pierre.
Cris des baigneurs. Plus près ! plus loin ! non, par ici !
Non, par là ! Les oiseaux gazouillent, Jeanne aussi.
Georges l'appelle. Chant des coqs. Une truelle
Racle un toit. Des chevaux passent dans la ruelle.
Grincement d'une faux qui coupe le gazon.
Chocs. Rumeurs. Des couvreurs marchent sur la maison.
Bruits du port. Sifflement des machines chauffées.
Musique militaire arrivant par bouffées.
Brouhaha sur le quai. Voix françaises. Merci.
Bonjour. Adieu. Sans doute il est tard, car voici
Que vient tout près de moi chanter mon rouge-gorge.
Vacarme de marteaux lointains dans une forge.
L'eau clapote. On entend haleter un steamer.
Une mouche entre. Souffle immense de la mer.

Victor Hugo, L'Art d'être grand-père, 1877
(manuel p.174)

Le jardin et la maison

Voici l'heure où le pré, les arbres et les fleurs
Dans l'air dolent et doux soupirent leurs odeurs.

Les baies du lierre obscur où l'ombre se recueille
Sentant venir le soir se couchent dans leurs feuilles,

Le jet d'eau du jardin, qui monte et redescend,
Fait dans le bassin clair son bruit rafraîchissant ;

La paisible maison respire au jour qui baisse
Les petits orangers fleurissant dans leurs caisses.

Le feuillage qui boit les vapeurs de l'étang
Lassé des feux du jour s'apaise et se détend.

- Peu à peu la maison entr'ouvre ses fenêtres
Où tout le soir vivant et parfumé pénètre,

Et comme elle, penché sur l'horizon, mon coeur
S'emplit d'ombre, de paix, de rêve et de fraîcheur...

Anna de Noailles, Le Coeur innombrable, 1901
(manuel p.173)

Marine


L’Océan sonore

Palpite sous l’oeil

De la lune en deuil

Et palpite encore,


Tandis qu’un éclair

Brutal et sinistre

Fend le ciel de bistre

D’un long zigzag clair,


Et que chaque lame,

En bonds convulsifs,

Le long des récifs

Va, vient, luit et clame,


Et qu’au firmament,

Où l’ouragan erre,
Rugit le tonnerre
Formidablement.

Paul Verlaine, Poèmes saturniens

(Manuel p.164)